Toros de Gravel
Sa Calobra, Puig Major, Formentor, Soller. C'est pour cela que Majorque est connue. Jusqu'à la première édition du Toros de Gravel qui promettait de faire découvrir le coin plus sauvage de l'île.
Avec une nouvelle adresse à Palma et un penchant pour les terrains difficiles, c'est un événement que nous ne pouvions pas manquer.
Un centre au style festif avait été érigé à Sineu pour ce long week-end qui s'articulait autour des 140 km de l'événement principal. Peut-être que seuls les organisateurs savaient vraiment ce qui les attendait avec un mélange d'influenceurs de l'industrie, de connaisseurs et de 'néophytes' locaux.
La campagne Majorquine s'est peu à peu révélée au fur et à mesure que la brume matinale se levait. Comme toujours, l'excitation et l'adrénaline au départ ont fait franchir le premier point de contrôle assez rapidement. Un 'trozo' d'ensaïmada, sorte de brioche traditionnelle majorquine, servant de brunch ne semblait pas suffisant pour un Catalan qui avait décidé que c'était l'heure de la bière. Avec 110 km de plus à parcourir, c'était un choix courageux.
Passer de Campos à la côte fut la première introduction de l'escalade abrupte et de la descente. C'est un paysage d'une beauté sauvage que reflète le trajet en lui-même. Ce gravier est difficile et technique et les choses commençaient à devenir vraiment dures. Le plaisir doit être mérité par une certaine limite entre un mélange d'effort physique et d'habileté à manier le vélo.
Puis le relief s'adoucie, les champs de terre cuite se délimitent par les traces blanches et poussiéreuses sur lesquelles nous glissons. Des moutons sont éparpillés parmi les oliviers, leur laine teintée de rouille par la poussière. Le gravier nous a éloigné des principales artères de l'île dans un paysage où le temps s'est évidemment arrêté pendant de nombreuses années.
La station de ravitaillement à mi-chemin est apparue comme un soulagement et une nécessité. Il ne s'agit pas d'une formule sportive ordinaire, conformément à l'événement. Du pain à la pâte d'olive, des friandises, du vermouth et du vin rouge pour un déjeuner éclectique. Vous pourriez être excusé de vous détendre si ce n'était pas pour la difficulté de l'effort sur la première section de gravier.
La beauté en revanche, et la raison du choix des vélos en gravier plutôt que des VTT, c'est la possibilité de rouler sur le goudron tout en parcourant un bloc important de kilomètres sous les roues. Nous roulons sur la côte, presque aveuglés par le reflet du soleil sur la mer Baléares.
Aussi agréable soit-il, il était temps de réactiver le mode gravel. Nous nous dirigions vers les collines...
Ce qui est sûr, c'est que 10 km de gravel sans suspension valent au moins 20 km sur routes goudronnées. Pour les cyclistes non-initiés, le gravier dans les montagnes fait des ravages et certains commencent à abandonner. Mais le plaisir réside dans ce mélange entre défis techniques et physiques que l'on retrouve sur les pistes.
Entre les arbres, nous trouvons non seulement le répit du vent, mais aussi des montées d'endorphiniques liées à l'aventure d'un endroit complètement inconnu. C'est une sensation spéciale, rendue possible par cet événement et les vélos en titane plus tolérants et conçus pour ce genre de sortie. On remarque un effet placebo dans leur allure esthétique. N'importe quoi pour nous amener jusqu'à la ligne d'arrivée.
Huit heures plus tard, nous arrivons au dernier point de contrôle qui offre du vin, du vermouth ou de l'eau pour arroser le pain à l'huile d'olive et au sel. Le bon sens l'emporte, heureusement, avant les derniers chemins tout-terrain. Surement pour faire monte l'adrénaline d'un cran dans nos corps fatigués, les organisateurs ont inclus une descente rocailleuse sur une seule voie. Cela passe sur une certaine période, jusqu'à ce qu'un arbre au sol occasione un saut périlleux non planifié. C'est le moment marquant d'une journée pleine d'incidents.
En dépit de la tombée de la nuit, les silhouettes des toits de Sineu sont perceptibles au-delà des champs. Alors que nous arrivons en ville, nous commençons à entendre le son des festivités de ceux qui ont déjà terminé devant nous.
Après un tour victorieux autour du vélodrome de Sineu, encouragés par ceux qui sont arrivés plus tôt, nous pouvons enfin décliper nos pieds. Le soulagement intérieur de la file d'attente et un alors sentiment de fierté grandissant.
Les seules choses qui restent à monter : le taureau machine et le train retour.
Photos : Arrière du Peloton