ROULER LA BENICE
En janvier, j'ai reçu un appel d'Alex qui me parle d'un évènement qu'il aimerait organiser. J'ai tout de suite compris que c'est le genre d'evènement auquel je voudrais participer. J'ai rencontré toute son équipe à Valence l'année dernière, et je suis extremement fière de la communauté bikepacking qui se créé en Espagne et dans le monde grâce à cela. Lorsque j'ai commencé à voyager en vélo il y a plusieurs années, je n'avais jamais imaginé la communauté et le sentiment d'appartenance que j'allais ressentir. Peu importe où vous voyagez, vous trouverez toujours une ""tribu"". Cette équipe de Valence, est en quelque sorte ma tribu.
Lorsqu'Alex m'a parlé de BeNice j'ai senti de la joie, mais aussi des doutes dans sa voix, sachant les risques : investir de l'argent mais aussi des heures de travail et donc sacrifier du temps hors de leur emplois. La décision n'a pas été simple, mais l'engouement de notre entourage et de notre communauté nous a motivés.
Juin est arrivé plus vite que prévu, et avec lui le départ de l'évènement. Bilbao et Valence ne sont séparés que de 600km, mais cela suffit pour que les climats et les gens changent. J'apprécie que l'Espagne offre une telle diversité. BeNice a rassemblé différentes personnes, de régions différentes aussi bien d'Espagne que d'Europe avec Sara d'Ecosse et Inigo de Bruxelles. Les autres participants venaient d'Andalousie, d'Aragon de Madrid principalement. Certains se connaissaient déjà, d'autres non. La mission de BeNice était d'accueillir et de rassembler les participants, en créant une petite communauté.
Le jour du départ de BeNice Alex me dit en route vers le camp de base ""Le temps est venu de savourer ce que nous avons apprecié créer"". Le camp de base se situe à Mas de Cotanda a quelques heures de Valence. Une masía ou mas est une construction rurale typique des régions de l'est de l'Espagne et dérive du terme latin mansus qui signifie maison de campagne. Ces batiments historiques ont été des élements clés dans l'agriculture durant des siècles servant de résidences, de fermes et de lieu de production. Ils symbolisent aussi la connection à la terre et à la communauté locale. Mas de Cotanda offre de magnifiques vues de la Sierra de la Batalla et sur les massifs alentours. La région est connue en espagne sous le nom de la España Vacía (L'Espagne Vide). Elle s'est en effet vidée d'un grand nombre de ses habitants au moment de l'exode rural.
Arrivés au meeting par différents moyens : vélos, vans et voitures, nous étions surpris de retrouver des visages familiers, mais surtout beaucoup de nouvelles têtes ! La magie de BeNice opérait bien : rassembler des personnes et créer une petite communauté. Au total nous étions une petite soixantaine à se rassembler autour d'Alex et Will, à écouter leurs consignes et l'organisation des prochains jours.
La discussion se lance spontanément autour des routes que chacun compte emprunter- Alex et Will ont organisés 8 routes différentes avec des niveaux de difficultés différents - mais aussi sur notre excitation face au diner qui se prépare dans la cuisine. Les fumets de légumes cuisinés nous parviennent aux narines et ouvrent notre appétit.
Ce premier diner nous donne un aperçu des délicieuses recettes veganes que nous allons déguster tout le week-end : houmous, tofu grillé, crème de poireaux, et bien sûr delicieux cafés et petits-déjeuners. Chapeau bas aux cuisiniers!
Durant la première nuit certains participants dormèrent en tente, en van et d'autres dans les chambres de Mas. Après une nuit orageuse, nous nous réveillons sous un beau soleil.
La journée commence par une séance de yoga menée par Cris de Surya Bikepacking. Elle nous permet de nous réveiller puis de nous sentir plein d'énergie et d'échauffer nos corps après une nuit humide. Un délicieux petit-déjeuner nous attend avant de commencer l'aventure, aux alentours de 10h.
Les premiers départs se font, et je choisis de suivre les participants de la route 7 - la plus longue et la plus difficile mais qui passe par les plus belles routes et par La Estralla, un village abandonné.
J'enfile mon maillot Café du Cycliste, je charge mon vélo de snacks, de nourriture et d'eau et je prends la route pour 79km, 1500 de dénivelé. Nous savons que nous devons rentrer pour 18h30. Nous partageons un morceau de la route 4, pensée pour atteindre la ville de Mosqueruela le plus simplement. Pour éviter la route tout du long, le parcours inclus un morceau de chemin. D'abord facile à arpenter, le chemin se transforme en un sentier de plus en plus technique et certains participants mettent pied à terre. L'autre épreuve qui nous attend est l'absence totale de point d'eau, de boutiques ou de restaurants pour se ravitailler. Nous passons par des fermes, déjà en altitude, et nous arrivons vers la descente de Monleón River et près de l'Estrella.
Atteindre "La Estrella" était spécial, nous avions de grandes attentes pour cet endroit parce que nous avions entendu de nombreuses histoires des locaux. Martín et Sinforosa ont été les seuls habitants du village reculé de ""La Estrella"" pendant plus de trente ans. Aujourd'hui, les seuls résidents sont les chats dont Martín et Sinforosa prenaient soin.
Après une pause déjeuner nous devons grimper quelques kilomètres pour quitter la Monleón et atteindre la plaine de"Vistabella, puis retourner au camp.
Après avoir esquivé de peu la boue, nous sommes retournés à la "Masía", tout sourire mais avec des corps épuisés. Notre grand groupe s'était divisé en deux et nous nous sommes rassemblés pour partager nos expériences avant la conférence de Juan. Juan s'est battu toute sa vie avec des problèmes de santé. Il mène sans cesse une course d'endurance contre les tumeurs dans son système digestif. Il est aujourd'hui un ultra-marathonien et un cycliste de longue distance. Une personne incroyable et inspirante, que avons été honorés d'écouter et qui nous a présenté son livre, Vacío (Empty) !
Nous nous sommes réveillés tôt sous un temps pluvieux et grisâtre. Pas vraiment une bonne nouvelle pour nous, mais bénéfique pour la région. Cris réussi à égayer la journée avec les premiers asanas du jour. Après le petit-déjeuner, nous nous sommes équipés pour l'aventure du samedi : affronter la route 5. Un premier groupe part pour explorer les pentes de la plaine de ""Vistabella"", un endroit incroyable à découvrir.
En suivant une section du GR7, nous traversons plusieurs fermes nichées entre la "Sierra de Boi" et les profondeurs de la rivière "Monleón", atteignant finalement l'ermitage de ""San Bartolomé"". Avec des origines remontant aux Templiers, le château de Boi offre une vue unique et magnifique sur la ville de "Culla".
Après être remontés jusqu'à la plaine de Vistabella, le sentier nous amène directement au centre-ville, où nous dévalisons les étales d'une boulangerie. Mouillés par la pluie mais revigorés par le sucre, nous rentrons au camp. Après avoir terminé le deuxième itinéraire, profité d'une douche chaude et de quelques collations, c'était à mon tour de parler. C'était incroyable de partager mes expériences entourée de personnes ayant la même vision du cyclisme. Des âmes qui comprenaient le voyage à vélo et apportaient de vrais débats sur le monde. Je serai toujours reconnaissante envers l'organisation et envers les participants.
Après un délicieux dîner, il était temps pour le tirage au sort, avec des prix incroyables offerts par toutes les marques qui ont soutenu l'événement. Nerveuse et intriguée, je me suis rassemblée avec les autres dans la salle principale pour le spectacle. Certains gagnants chanceux sont repartis avec jusqu'à trois prix !
Le dimanche est arrivé, apportant des itinéraires plus courts pour nous assurer de pouvoir savourer la gigantesque paella à 14 heures. Avec un groupe de filles, nous avons flâné autour de la ""Masía"". Nous ne voulions pas manquer la paella ni l'occasion de démonter le camp tôt et d'aérer la tente. Bien que la pluie ait cessé, l'humidité persistait dans l'air.
Deux grandes paellas véganes sont arrivées à table avant l'heure prévue, concluant ainsi quelques jours de connexion et de reconnexion qui n'auraient pas été possibles sans tout le travail acharné de l'équipe BeNice. Les adieux sont toujours doux et amers, mais aucun des organisateurs n'a refusé une future réunion, alors… à dans quelques mois ! Merci, merci et encore merci. Avec beaucoup d'amour !